Une place au soleil

Jeune club à l’échelle de la LNB, simplement aperçu dans l’élite le temps de deux saisons, Fos-Provence va désormais devoir survivre sans son bâtisseur Rémi Giuitta.

14 juin 2018. Fos-sur-Mer vient de remporter les playoffs d’accession de Pro B et Mamadou Dia, « Le Maire », se fait alpaguer de tous les côtés sur le parquet de la Halle Parsemain. Surtout, le capitaine emblématique des BYers* cherche son coach Rémi Giuitta du regard. « Je pense qu’il doit être au SAMU là », se marre-t-il. Difficile de trouver meilleures incarnations du club méridional que ces deux hommes, amis dans la vie…

Fils d’un ancien président (Henri, aux manettes entre 1978 et 1986), Rémi Giuitta a été biberonné au basket fosséen depuis le berceau. « Dès l’âge de 2-3 ans, j’étais assis au bout du banc en Nationale 4 ou en Région dans l’ancienne salle », racontait-il. Après une courte carrière de meneur, transitant notamment par North Iowa, Maurienne (Pro B), CahorSauzet (NM2) et… Fos-sur-Mer, évidemment, le natif de Marseille enfile le costume d’entraîneur à seulement 26 ans, appelé en urgence par le président Jean-Pierre Barnes pour sauver Fos d’une relégation en Nationale 3 au printemps 2004. À l’époque, les adversaires se nomment Lagnieu ou Pont-de-Beauvoisin… La mission maintien est validée et un an plus tard, Rémi Giuitta subtilise l’expérimenté Mamadou Dia (27 ans) à Saint-Chamond, où il officiait depuis 1999.
Leur collaboration ne tardera pas à porter ses fruits. En 2006, Fos-sur-Mer termine vice-champion de France NM2 et accède au niveau supérieur. Trois années en NM1 suffiront ensuite pour s’ouvrir les portes de la Pro B. Une accession acquise sur tapis vert grâce aux difficultés financières de Besançon et Saint-Étienne.

Subitement devenu le Petit Poucet du monde professionnel, le club des Bouches-du-Rhône étonne dès son arrivée dans le grand monde. La première victoire de son histoire en LNB est acquise dans une salle mythique : le Palais des Sports de Pau, face à l’Élan Béarnais (79-74 le 16 octobre 2009). À l’image de Mamadou Dia qui ne cessera d’améliorer ses statistiques jusqu’à l’âge de 37 ans (13,4 d’évaluation), Fos-sur-Mer se développe rapidement. Sa Halle Parsemain s’agrandit chaque été, les gros CV affluent sur les bords de la Méditerranée. Les succès s’enchaînent et le FOPB devient une place forte de la Pro B, au point de lorgner sur le prestigieux voisin, Marseille. Mais le rapprochement tant espéré n’aura jamais lieu. Pire, l’équipe de l’Hauture se casse les dents chaque année sur les playoffs, avec notamment quatre échecs en demi-finale. Jusqu’à la fameuse année du SAMU, en 2018. Face à Nancy, Rouen et Roanne, les BYers ne perdent pas un seul match des phases finales et accèdent enfin à leur Graal, 56 ans après la dernière apparition d’un club provençal en première division. « Au fond de moi, j’ai toujours eu ce rêve-là », souffle Rémi Giuitta, profondément ému.

Quatre ans plus tard, les yeux embués, l’emblématique entraîneur annonce son retrait. Sa mission est réussie : après 700 matchs coachés et 18 années épuisantes passées à enfiler toutes les casquettes possibles, l’ancien professeur d’EPS laisse son club de cœur en Betclic ÉLITE, au terme d’un sprint final haletant au printemps 2021, conclu par un maintien arraché à 0,5 seconde du buzzer final de la saison. Entre-temps, il avait très mal vécu la découverte de la Jeep ÉLITE, très éprouvante humainement avec un véritable défilé de joueurs (16 au total en 2018/19) pour celui qui se vantait de n’en avoir coupé que six au cours de son mandat. L’anomalie fut réparée en 2021 avec un doublé Leaders Cup – Championnat de France Pro B. Et qui rappela-t-il comme pigiste médical en mars, alors que l’infirmerie se remplissait dangereusement ? Mamadou Dia, 43 ans, pourtant semi-retraité avec simplement 23 rencontres de NM2 (avec Salon-de-Provence) au compteur en 22 mois. Comme si ces deux-là ne pouvaient pas gagner l’un sans l’autre…
*BYers comme Black and Yellow (Jaune et Noir)