
Pierre angulaire de la SIG Strasbourg version 2004/05, joueur mythique de l’histoire du championnat de France, Ricardo Greer s’est replongé dans ses souvenirs alsaciens, 20 ans après…
Ricardo, avez-vous l’impression que cela fait déjà 20 ans que vous avez été titré avec la SIG Strasbourg ?
Pas du tout ! C’est passé très vite. C’est fou, j’ai l’impression que c’était hier. Mon fils est né au cours de cette saison d’ailleurs. Je garde d’excellents souvenirs de cette saison.
Quand on évoque cette saison 2004/05, quel souvenir vous revient instinctivement ?
Gagner le titre de champion de France avec mon frère, Jeff ! C’était incroyable. C’était la première fois qu’on avait la chance de jouer ensemble… Et mes coéquipiers ! On avait un super coach, Eric Girard, qui arrivait à gérer la folie de tous les mecs. Bravo à lui (il rit). Ce qui me revient, c’est l’incroyable proximité qu’on avait tous dans cette équipe : Afik Nissim, John McCord, Aymeric Jeanneau, Sharif Fajardo, Steve Payne, Crawford Palmer, Hrvove Perincic, etc… Le lien était incroyable.
Quand vous revoyez votre frère, vous en discutez encore ?
Oui, il était ici fin mai pour la remise des diplômes de mon fils et on en a encore reparlé. On se disait à quel point cette époque avait été géniale. Et surtout à quel point on s’est battu. Car vous savez, on n’était pas censé gagner le titre en 2005. L’ASVEL et Pau-Orthez étaient en EuroLeague mais on a su trouver une vraie alchimie en tant qu’équipe.
🎬 "Strasbourg 2005 – Le couronnement final" 🏆
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Pourquoi aviez-vous choisi la SIG Strasbourg lors de l’été 2004 ?
Déjà, je me rappelle être revenu en France pour les trois derniers matchs de la saison régulière 2003/04 avec Gravelines et d’avoir perdu en finale contre Pau-Orthez. Pendant cette période, j’avais joué contre Le Havre et Eric Girard m’a dit qu’il était en train de signer à Strasbourg. Il m’avait déjà coaché au STB, il avait mon frère Jeff cette saison-là et il m’a dit : “Je veux vous coacher tous les deux ensemble !” Ça m’a séduit ! Jeff avait brillé au Havre donc il avait énormément de grosses équipes qui le voulaient mais il a aussi décidé de jouer avec moi. Jouer aux côtés de mon frère était vraiment la raison principale, sans oublier que je connaissais déjà le coach.
Vous savez que 20 ans plus tard, Eric Girard joue encore une finale en LNB cette semaine…
C’est complètement fou, non ?! (il rit) Il refait le coup chaque année ! J’ai joué pour beaucoup de grands entraîneurs en France – Vincent Collet, Jean-Luc Monschau – mais Eric est l’un des tous meilleurs coachs que j’ai côtoyé, sportivement et humainement. Je suis heureux et fier de lui.
Qu’est-ce qui a rendu cette équipe si spéciale, en dehors de cette fameuse alchimie ?
On avait plein de joueurs qui pouvaient marquer ! Si vous repensez à la finale, quand on bat Nancy, Afik Nissim a rentré d’énormes shoots pour nous ramener dans le match. On avait tellement d’options différentes, c’était dur de savoir qui stopper : Jeff était notre meilleur marqueur, Fajardo a sorti une grande saison, John McCord avait toujours un mismatch au poste 4. Tout le monde était capable de scorer 20 points. Et on avait un capitaine phénoménal avec Crawford Palmer !
On vous appelait le gang de New York…
C’est ça ! Mon frère, Sharif Fajardo, John McCord et moi-même ! C’était complètement dingue d’être tous ensemble. Ça nous a servis aussi, on était tous New-Yorkais, c’était un lien particulier entre nous et ça nous a rapprochés. Et comme je l’ai dit, Eric savait gérer les différentes personnalités. Je ne sais pas si un autre coach s’en serait sorti avec toutes nos conneries (il rit). Mais il a été génial ! Parfois, il s’énervait contre nous, on s’énervait contre Eric mais on a toujours eu ce respect mutuel.
Parce que ça a été difficile parfois ?
C’est surtout qu’on avait tous des personnalités différentes. Prenez Aymeric Jeanneau, il est complètement à l’opposé d’Afik Nissim par exemple. Donc Eric devait composer avec Aymeric, avec Afik… et puis avec moi après (il explose de rire). En y repensant, je me sens mal pour lui mais il a fait du super boulot !
Vous n’étiez peut-être pas censé gagner le titre mais en finale contre le SLUC Nancy, seulement 8e de la saison, c’est vous qui aviez la pression du favori…
Sauf qu’à l’époque de la finale sèche à Bercy, n’importe qui pouvait gagner ! La preuve avec Roanne en 2007. Nancy avait une super équipe, ils nous ont dominé tout le match et je me souviens du coup de gueule d’Eric Girard à la mi-temps. Dans les vestiaires, il nous crie dessus, nous insulte, nous demande ce qu’on fout et nous sommes ressortis métamorphosés ! Le format des playoffs était différent : des quarts en aller-retour, donc on pouvait aller en finale même en perdant le retour, c’est ce qui s’est passé pour nous avec l’ASVEL d’ailleurs.
Et vous avez été le MVP de la finale !
J’ai sorti un bon match (14 points, 6 rebonds, 4 passes décisives et 3 interceptions) mais je retiens surtout notre état d’esprit et notre mentalité. On ne voulait pas abandonner. Afik Nissim a aussi réalisé une grande finale, comme John McCord. Dans le vestiaire, j’ai dit que ce trophée appartenait à toute l’équipe car personne n’avait baissé les bras et on l’avait fait ensemble. C’est marrant d’ailleurs car je vous parle de mon bureau en ce moment-même, et j’ai le trophée sous les yeux : c’est écrit “Finale Pro A 2005 MVP”

Et la fête d’après-titre, est-ce qu’il en reste des souvenirs ?
Je me rappelle que mon ami Stephen Jackson était présent, avec Antoine Walker ! On est allé en boite de nuit, au VIP Room. On a vraiment passé une bonne soirée. Le lendemain matin, je me souviens être à l’hôtel avec ma femme, qui était enceinte. Personne ne savait où j’étais et l’intendant, Carlito, m’a appelé : “Ricardo, il faut y aller, on rentre à Strasbourg !” Je lui ai répondu : “Carlito, on est champions ! Maintenant, on prend notre temps” (il rit)
Vous avez décroché un deuxième titre en 2008 avec Nancy. Est-ce qu’il y a des similarités ?
Cette fois, c’est Jeff qui avait été MVP et c’était génial ! On avait encore un capitaine incroyable avec Cyril Julian mais cette équipe du SLUC était beaucoup plus jeune, très différente. On n’avait pas trop de vétérans mais des gars comme T.J. Parker, Mike Bauer, Zabien Dowdell… Avec Nancy, j’avais plus d’expérience donc j’ai assumé plus de responsabilités !
Vous avez passé une grande partie de votre carrière en France : cela a été votre pays fétiche ?
Oui, ça a été le meilleur pays ! Je répète toujours que la France est ma seconde maison : mon fils est né à Strasbourg, ma fille à Nancy. J’en garde énormément d’amis, de contacts, on peut dire que cela a été l’une des périodes les plus importantes de ma vie. L’une des meilleures aussi. La France fait partie de moi maintenant.
Et vous avez marqué les esprits en France…
Je pense que c’est grâce à ma fidélité ! Je ne suis jamais vraiment parti à l’étranger, je suis resté en France et j’ai gagné avec plusieurs équipes. C’est le plus important. Quand on arrive dans un nouveau pays, on pense souvent qu’il faut marquer le plus possible. Mais non, ce sont les titres qui apportent le plus. C’est ce que j’ai toujours essayé de faire en premier : gagner.
“STRASBOURG 2005 – Le couronnement final”, documentaire disponible ce jeudi 12 juin à 17h.
Rendez-vous ce jeudi 12 juin sur la chaîne YouTube de la LNB pour revivre le sacre de la SIG Strasbourg avec plusieurs Champions de l’époque : Eric Girard (coach), Aymeric Jeanneau et Crawford Palmer.

20 ans après l’unique titre de Champion de France du club, la SIG organise un évènement qui s’annonce déjà exceptionnel au Rhénus : “La nuit des Champions” avec notamment un match entre les vainqueurs de 2005 et les légendes du club.