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Jacques Monclar et le dernier sacre d’Antibes : retour sur une finale légendaire en 1995

En 1995, Jacques Monclar conduit Antibes à son troisième et dernier titre de champion de France, au terme d’une finale mémorable remportée face à Pau-Orthez. Retour sur ce chef-d’œuvre collectif, et sur une époque où les Azuréens régnaient sur le basket français.

Le 16 mai 1995, au Palais des Sports de Pau, l’Olympique d’Antibes-Juan-les-Pins Basket écrit l’une des plus belles pages de son histoire. Portée par un effectif exceptionnel et un entraîneur à poigne, Jacques Monclar, l’équipe décroche un troisième sacre en Pro A (après ceux de 1970 et 1991) grâce à un shoot mythique de Micheal Ray Richardson.

Une série d’une intensité folle

En cette saison 1994-1995, Antibes sort d’une finale perdue l’année précédente. Avec un effectif renforcé par l’arrivée de Micheal Ray Richardson et Willie Redden, Jacques Monclar dispose d’un groupe armé pour aller au bout. Le parcours européen le prouve : demi-finaliste de la Coupe Saporta. Mais c’est bien sur le sol français que l’histoire va s’écrire.

Opposés à Pau-Orthez en finale, les Azuréens s’inclinent d’abord à domicile (87-91). « On n’est pas bons au premier match, eux sont très bons », résume Monclar. Mais dès le match 2, les rôles s’inversent. Antibes s’arrache en prolongation grâce à un contre décisif de Redden et un Richardson clutch malgré une technique sifflée à Monclar (100-96). Le momentum est relancé.

Le match 3 à Pau est une démonstration collective. Antibes s’impose de 14 points (71-85) avec un David Rivers en feu (36 points) et une défense étouffante. Le groupe commence à montrer pourquoi Monclar le considère comme « peut-être l’équipe la plus talentueuse qu’il ait eue ».

Le tir de la légende

Mais c’est bien lors du match 4 que tout va se jouer. Dans une ambiance électrique et devant 8 000 spectateurs, la partie est indécise jusqu’aux dernières secondes. À 3,5 secondes de la fin, Pau mène 80-79. Jacques Monclar demande un dernier temps-mort. Le ballon ira à Micheal Ray Richardson, pourtant à 3 sur 17 aux tirs jusqu’ici. « C’était clair, Mike prend le dernier tir », tranche-t-il.

Le vétéran américain s’élève, malgré la défense de Freddy Fauthoux, et plante un tir mythique. 81-80, Antibes est champion. « J’avais un peu fermé les yeux. Quand je les ai ouverts, j’ai vu un tas d’hommes, les uns sur les autres », se souvient Monclar, ému.

Une équipe bâtie avec soin

Ce sacre est l’aboutissement d’un travail de longue haleine entamé dès 1989 par Jacques Monclar. L’effectif 1995, construit patiemment saison après saison, repose sur des joueurs clés : David Rivers, Stéphane Ostrowski, Laurent Foirest, Fred Domont ou encore Arsène Ade-Mensah, Jean-Philippe Méthélie et bien sûr “Sugar” Ray Richardson. « Chacun avait son rôle, et Mike a été la cerise sur le gâteau », explique le coach.

Le groupe est solide, tant sur le terrain qu’en dehors. « C’était une équipe formidable, des mecs formidables. Une vraie équipe, avec une collégialité rare », insiste Monclar. Il n’oublie pas non plus les fidèles du staff : Serge, Lee (Johnson), Thierry… ni les dirigeants comme le président Alain Trichot ou Solly Azar.

Un sacre qui aurait pu mener plus loin

Malheureusement, ce sacre est aussi l’apogée d’un cycle. La saison suivante, malgré une nouvelle demi-finale, les ennuis financiers freinent le club. « On ne saura jamais jusqu’où cette équipe aurait pu aller. On visait le top 6 européen. Mais avec les problèmes liés aux élections municipales… », regrette Monclar, qui a rejoint l’Elan béarnais en 1996.

Malgré tout, ce titre reste une fierté pour toute une ville. Le retour à Antibes est triomphal : cortège en cabriolets, réception à la mairie… « On a su valider les investissements. On a aussi installé durablement l’ADN basket dans la ville », affirme Monclar, qui se souvient de vols d’avion mémorables le 17 mai au matin, entre Pau et Paris puis Paris et Nice.

Un héritage encore vivant

Trente ans plus tard, l’empreinte de cette épopée est toujours là. Le centre de formation est florissant, Antibes a su rebondir après des descentes jusqu’en Nationale 1, et des joueurs comme Isaïa Cordinier ou Timothé Luwawu-Cabarrot en sont issus.

Le regard de Jacques Monclar sur le présent reste lucide mais optimiste : « Il y a une stabilité récente, un bon travail de formation, une salle adaptée. Il faut que le terrain suive. Mais Antibes reste un club historique du basket français. »

Ce titre de 1995 ne marque pas seulement la fin d’un cycle, il installe durablement Antibes comme une terre de basket. Le centre de formation, structuré dès cette époque, reste aujourd’hui une référence. Et la filière locale est plus vivante que jamais.

Jacques Monclar raconte d’ailleurs avec émotion une scène récente : lors de la finale U18 de la Coupe de France à Bercy, remportée par Antibes en avril, cinq joueurs issus du collège Fersen – à quelques minutes de la salle historique du Stade Foch – composaient l’équipe victorieuse. « Ce sont des Antibois, de vrais gamins du coin. Quelle autre ville en France peut en dire autant ? », s’émerveille-t-il. Une preuve que le travail de fond commencé auparavant avec une volonté municipale mais accentuée il y a 30 ans par ce titre porte encore ses fruits.